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Maasina


Amadou Hampaté Bâ & Jacques Daget
L'empire peul du Macina (1818-1853)

Paris. Les Nouvelles Editions Africaines.
Editions de l'Ecole de Hautes Etudes en Sciences Sociales. 1975. 306 p.


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Chapitre Premier

Lorsqu'en 1495 l'Askia Mohammed fit son célèbre pèlerinage à La Mekke, il rendit visite au vénérable Cheik Mohammed Abdoul Karim ainsi qu'au gouverneur de la ville sainte, le chérif Hassanide Moulay el Abbas. Ce dernier posa sur la tête du pèlerin un bonnet vert, l'enserra d'un turban blanc et, prenant tous les assistants à témoins, il déclara qu'il instituait l'Askia Mohammed khalife du Prophète pour tout le pays de Tekrour, et que quiconque ne lui obéirait pas dans le dit pays désobéirait à Dieu le Très-Haut et à son Envoyé.
— Je suis en outre heureux, ajouta-t-il en s'adressant au nouveau pontife, de te révéler que tu es le onzième khalife des douze orthodoxes prévus par le Prophète.
L'Askia Mohammed, auréolé du titre d'El Hadj et intronisé à la dignité de khalife par la plus haute autorité de l'Islam, ne voulut pas regagner son pays d'origine sans avoir visité la capitale de Misra [Le Caire]. Il désirait y poser quelques questions aux « grands turbans » de l'Université Al Ahzar et notamment au cheik Abdarrahaman Sayoutiyou, dont la réputation de science et de pitié l'avait fortement impressionné. En effet, même les personnages les plus illustres et les plus savants ne parlaient jamais du cheik ascète Abdarrahaman sans porter la main à leur front, à leur bouche et à leur poitrine, geste signifiant : « c'est notre chef, nous l'embrassons et le portons dans notre coeur ». Quant à l'Askia Mohammed, la renommée qu'il s'était acquise par son faste, ses largesses et ses pieuses intentions, l'avait déjà précédé au Caire ; il n'eut aucune peine à obtenir audience auprès du cheik Abdarrahaman Sayoutiyou. Entre autres questions, il lui demanda le nombre de khalifes orthodoxes prédits par le Prophète.
— Le Prophète, répondit le saint homme, a prédit qu'il y aurait douze khalifes orthodoxes après lui.
L'Askia El Hadj Mohammed avait dans sa suite deux éminents marabouts, Alfa Salif Diawara et Alfa Mamadou Toulé. Ils avaient le don d'entrer en communication avec les esprits et cherchèrent à avoir confirmation des paroles du cheik Abdarrahaman Sayoutiyou. A la suite de pratiques sur le détail desquelles la tradition reste muette, ils se trouvèrent transportés de nuit dans un souterrain situé entre Le Caire et Alexandrie, au milieu d'une ville peuplée de génies musulmans. Ils manifestèrent à un passant le désir d'être présentés au chef de la cité. C'était un vieux et vénérable patriarche ; il enseignait le Coran et la Tradition du Prophète à une foule considérable d'auditeurs. Dès qu'il eut aperçu les visiteurs, il se leva en leur honneur. Tous les génies en furent surpris : pour que leur chef témoignât tant d'égard à deux créatures humaines dont les corps sont faits d'argile pétrie, il fallait que leurs âmes fussent de qualité supérieure.
— Soyez les bienvenus parmi nous, ô marabouts vénérables, heureux compagnons du onzième khalife du Prophète d'Allah.
Les deux visiteurs venaient d'avoir confirmation de la haute dignité de l'Askia El Hadj Mohammed. Enhardis par le bon accueil qu'ils avaient reçu, ils demandèrent au chef des génies quel était son nom :
— Je me nomme Chamharouch Djinni. J'ai été instruit par le Prophète d'Allah lui-même. Votre chef l'Askia El Hadj Mohammed est le onzième khalife, comme vous l'a révélé Moulay el Abbas, grand chérif et gouverneur de La Mekke. En effet, continua Chamharouch Djinni, l'Envoyé d'Allah a dit : « après moi il y aura à la tète de l'Islam douze imams, c'est-à-dire douze khalifes, orthodoxes ; cinq seront de Médine, deux de l'Egypte, un de Sam, deux de l'Irak et deux du Tekrour ». Les dix premiers ont déjà régné, le onzième est votre chef l'Askia El Hadj Mohammed, le douzième naîtra onze ans avant la fin du XIIe siècle dans l'occident africain ; il brillera quand le XIIIe siècle aura trois fois onze ans et lui quatre fois onze ans 1. Pour étayer mes déclarations et vous prouver que je lis aussi bien le passé, le présent et l'avenir, j'ajoute que votre chef réside habituellement à Kaw-Kaw, deux fois 26 2. La vertu de ce nombre se passe de tout commentaire ; il lui permettra de régner sur un vaste pays, mais il ne soumettra pas la région où naîtra le douzième khalife.
Revenus auprès de l'Askia, les deux marabouts rapportèrent fidèlement les paroles de Chamharouch Djinni. El Hadj Askia Mohammed décida d'aller voir lui-même le chef des génies. Le cheik Abdarrahaman Sayoutiyou ménagea l'entrevue et le dialogue suivant s'engagea entre l'Askia El Hadj Mohammed et Chamharouch Djinni :
— Quelle sera la fin de l'empire du Tekrour ?
— Il périra dans le feu et le sang parce que son peuple se rebellera contre l'ordre établi. »
— Dienné et Tombouctou seront-elles épargnées ?
— Ces deux cités survivront longtemps. Le douzième khalife proviendra des alentours de Dienné. Il rétablira l'ordre jusqu'à Tombouctou. Il pourfendra plus par sa langue que par son sabre. Il percera plus par son exemple que par sa lance. Il éclairera plus par sa science que par des candélabres d'or et d'argent. Il soumettra un pays exondé contre lequel tu lutteras en vain.
— A quoi cet homme devra-t-il son influence et pourquoi Allah le choisira-t-il pour en faire le douzième et dernier khalife de la lignée orthodoxe ?
— Il devra son influence au courage de ses partisans et à la droiture civique de ses conseillers. Allah le choisira parce qu'il l'aura doté de qualités de coeur et il esprit. Il dormira peu ; il adorera beaucoup. Il ne s'écartera jamais du Coran ni de la Tradition du Prophète. Le peuple éprouvera sa conviction ; il trouvera en lui un chef juste et plein de mansuétude pour ceux qui ne s'attaquent pas aux autres à cause de leur religion.
— Quel sera son nom ?
Chamharouch Djinni, après une pause, déclara :
— Je répondrai par un verset coranique : « Jésus, fils de Marie, dit : “O fils d'Israël ! je suis l'apôtre d'Allah [envoyé] vers vous, déclarant véridique ce qui, de la Thora, est antérieur à moi et annonçant un Apôtre qui viendra après moi, dont le nom sera Ahmad ”(LXI, 6) ».
— Il aura donc pour nom Ahmad ?
— Oui.
— Aura-t-il un génie chef de guerre ?
— Certes oui, avec la permission d'Allah nous lui affecterons l'un des nôtres, un puissant guerrier qui aura raison des génies rebelles, compagnons de Satan et inspirateurs dévoués des fétiches. Il les vaincra à chaque rencontre.
— Est-il possible de connaître le nom de ce génie ?
— Pas le nom même, mais sa valeur numérale et les lettres isolées qui entreront dans la composition de son nom. Ce nom sera composé par le prédestiné lui-même, le moment venu.
— Quelle est la valeur numérale et quelles sont les lettres ?
— La valeur numérale est égale à celle du mot « ayqacha » selon le compte occidental et les lettres sont les six que voici : sin, yây, , , alif, 3. »
— Je m'incline devant lui, en dépit des siècles qui nous séparent. Un homme qui tire sa puissance de sources telles que celles que tu m'as révélées, fera certes briller la lumière divine et nul ne prévaudra contre lui.
L'Askia El Hadj Mohammed prit congé de Chamharouch Djinni. Puis il invita un de ses secrétaires, Ali Abdoullay, à rédiger pour lui une lettre destinée au douzième et dernier khalife orthodoxe à venir, Ahmad.
— Cette lettre parviendra-t-elle à son destinataire ? questionna le secrétaire.
— Cheik Mohammed Abd el Karim l'affirme, répondit l'Askia.

Voici le texte de la lettre tel qu'il a été conservé par la tradition orale :

« De la part du Prince des croyants, vaillant guerrier qui fait périr les négateurs d'Allah, Askia Mohammed, fils d'Aboubakari, à son héritier doué de qualités dignes d'éloges, ceint pour l'exécution de la loi d'Allah, actif, investi de la dignité de Commandeur des croyants, Ahmad, à qui Allah prêtera main forte, salut et haute considération des plus distingués. A ton intention auguste je destine tout ce qu'il y a de plus brillant et de plus estimable pour attester que je reconnais en toi le bien « signé ». Je t'annonce pour que tu t'en réjouisses que tu seras le sceau des remplaçants orthodoxes. Allah te fera triompher de tes antagonistes. Tu seras le soutien des élus. Je te demande une bénédiction ; c'est une manière de te reconnaître comme le chef de file du groupe auquel je demande à Allah d'appartenir au jour du jugement.
Gloire à Dieu et hommage à toi et à tous ceux qui s'inspireront de tes actes pour honorer notre modèle et seigneur Mohammed, l'homme parfait. Puisse Allah exaucer mes vœux et te faire parvenir cette lettre de telle manière qu'il lui plaira.»

Or, à une époque difficile à préciser, mais vraisemblablement antérieure au règne de l'Askia Mohammed, une tribu peule venant du Fouta-Toro s'était fixée dans la région actuelle de Wouro Nguiya, entre Dogo et Banguita 4.
Cette tribu, qui portait le nom générique de Foyna, comptait seize groupements dont le plus important était celui du clan des Sangaré Bari. Les Peuls de Foyna prospérèrent rapidement, leur cheptel s'accrut, et ils devinrent une source d'inquiétudes pour les Bambara du Séno Bokiyo qui étaient alors maîtres du pays. Le chef de ces derniers était entouré de géomanciens qui chaque matin lui prédisaient l'avertir. Un jour, ils annoncèrent qu'un homme peul devait naître dans un des clans Foyna, qu'il porterait un coup mortel aux rois bambara et qu'il les éclipserait tous.
En écoutant ces sombres prédictions, le chef du Séno Bokiyo s'écria :
— Je veux que les clans peuls de Foyna disparaissent de mes états. Leur extermination sera un service que je rendrai à ma descendance et à celle de tous les rois bambara où qu'ils se trouvent. Une armée bambara attaqua Foyna. Les Peuls furent défaits, leurs animaux razziés, leurs villages détruits. Tous les habitants furent conduits chez le roi bambara qui distribua les femmes et les filles à ses sujets, et fit exécuter les plus vaillants des hommes peuls. Parmi les condamnés à mort du clan Bari, un certain Hammadi, fils de Ngarika, se faisait remarquer par son air paisible et résigné. Le roi bambara lui dit en s'approchant :
— Ce n'est certes pas de toi que naîtra celui qui détrônera les rois bambara!
Puis il le fit libérer avec les siens, lui restitua ses animaux, mais lui intima l'ordre de disparaître définitivement de ses territoires. Ce Hammadi fut appelé depuis Hamman Daɗi Foyna, c'est-à-dire Hamman le rescapé de Foyna. Il quitta le Wouro Nguiya et alla se réfugier dans le Fittouga 5.

Hammadi Boubou mourut deux ans après la naissance de son fils Amadou et fut enterré à Yongosiré 7. L'enfant fut recueilli par son grand-père maternel, Alfa Gouro, résidant à Toummoura, qui se chargea de son éducation morale et matérielle et lui donna ses premières leçons coraniques. Quand le jeune Amadou eut atteint l'âge de 7 ans et put suivre un enseignement hors du domicile familial, son grand-père le confia à Alfa Hambarké Sangaré, de Lardé Bali 7. Pendant quatre ans, il reçut les leçons de ce maître, puis, celui-ci étant mort, il entra à l'école coranique d'Alfa Samba Hammadi Bamma. Ce marabout serait, dit-on, celui qui donna à Amadou ses dernières leçons sur le mode de lecture correcte du Livre sacré. En effet, le Coran ne se lit pas comme un livre profane : il existe sept manières de le psalmodier et c'est tout un art que d'interpréter correctement les signes phonétiques placés au-dessus et au-dessous du texte. Alfa Samba Hammadi Bamma eut son heure de célébrité. Il était cadi de la région de Tyoubbi 8 ; c'est devant lui qu'Amadou, jeune étudiant, cita les rimayBe de Naréwal 8.
On raconte qu'à l'époque où Amadou poursuivait ses études auprès d'Alfa Samba Hammadi Bamma, à Tiddéré Kali 8, il avait pour servante une captive héritée de son père. Cette servante, mal conseillée par de jeunes rimayBe, se sauva à Naréwal. Amadou se rendit dans ce village en vue de faire revenir sa servante. Celle-ci s'était cachée chez des rimayBe qui dirent à Amadou :
— La personne que tu cherches est des nôtres ; elle est sous notre protection et la honte s'attacherait à notre nom si nous te la rendions.
— Je vous cite devant le tribunal d'Alfa Hammadi Bamma, répondit Amadou.
— Non, reprirent les rimayBe, nous récusons le jugement d'Alfa Hammadi Bamma parce qu'il est ton maître. Recourrons plutôt à l'arbitrage d'Alfa Hamma Bamma de Sossobé 8.
Amadou, sachant pertinemment que le marabout de Sossobé était l'allié des rimayBe de Naréwal et qu'il ne manquerait pas de prendre parti pour ces derniers répondit seulement :
— Vous êtes de mauvaise foi. J'en appelle à Dieu.
Amadou quitta Naréwal pour rejoindre Tiddéré Koli ; mais à peine était-il arrivé à Takanéné 8 qu'un violent incendie éclata dans Naréwal. Les habitants n'eurent que le temps de se sauver en emmenant avec eux quelques hardes. Ils se réfugièrent dans un îlot du Diaka et regardèrent de loin leurs cases et leurs biens se consumer sans pouvoir intervenir. Quelle ne fut pas leur surprise en voyant des flammèches entraînées par le vent venir tomber au milieu de l'îlot où ils se croyaient en sûreté. Le feu prit avec une telle rapidité que chacun ne songea qu'à sauver sa tête ; tout ce qui avait été amené dans l'îlot fut entièrement consumé. Un vieux dimaaDo conseilla de rendre la servante d'Amadou.
— Le feu de Dieu s'est attaché à nos pas, dit-il, pour nous punir de notre iniquité vis-à-vis du jeune Amadou Hammadi Boubou.
La servante fut rendue, mais les gens de Naréwal ne firent rien pour réparer le dommage qu'ils avaient causé à son maître.
Encore de nos jours, on prétend qu'un incendie éclate inévitablement chaque année à Naréwal ; ce serait un châtiment divin pour punir les gens du Macina de leur mauvaise foi habituelle.
Ayant quitté Tiddéré Koli, Amadou se rendit à Sono, auprès d'Almami Sono 9 pour se perfectionner dans la connaissance du Coran, dont il savait tous les textes par cœur depuis l'âge de 12 ans. Désormais, il mènera de pair ses études coraniques et le métier de berger auquel son grand-père l'astreignait pour lui permettre de payer ses maîtres et de gagner sa propre vie. Il fut étudiant berger durant dix ans. A l'âge de 18 ans environ, Amadou épousa sa cousine du côté maternel, Adya.
A 22 ans, Amadou était devenu un marabout notoire. Il pouvait donner des leçons et discuter sur plusieurs matières, telles que : « Sources du Droit canonique », « Théologie », « Rhétorique », etc. Il fut attiré par la réputation de Dienné, ville où d'éminents marabouts enseignaient toutes les sciences islamiques connues à l'époque. Emmenant avec lui un troupeau de quelques têtes de bétail et les élèves à qui il apprenait le Coran, il quitta Sono et vint se fixer à Roundé Sirou, près de Dienné 10. De là, il pouvait facilement aller écouter les leçons des docteurs de la ville. Il fit alors connaissance d'un jeune marabout pasteur comme lui, Seydou Poullo 11. Les deux jeunes gens se lièrent d'amitié ; ils allaient ensemble écouter les enseignements qui se donnaient un peu partout dans les différents quartiers de Dienné.
Un jour qu'il se promenait dans le quartier de Kanafa, Amadou aperçut dans un vestibule un humble marabout qui lisait silencieusement dans un livre. Il le salua. Le marabout l'invita à entrer et à s'asseoir. Après les questions habituelles :
— D'où viens-tu ? Qui es-tu ? Quels sont tes nom et prénom ? Que veux-tu ?
Le marabout de Kanafa, qui se nommait Kabara Farma, s'intéressa à Amadou dont la vivacité d'esprit et la modestie l'avaient frappé. Kabara Farma était un grand mystique, il était très instruit, mais dissimulait son savoir. Sa fortune modeste l'empêchait d'être très entouré. Mais Amadou prit l'habitude de venir chaque jour à Dienné pour l'écouter et aux heures de la prière il l'accompagnait à la mosquée. Deux autres personnes fréquentaient régulièrement Kabara Farma : Ousmane Bokari et Alfa Hamidou Sissé 12. Amadou fit leur connaissance et se lia d'amitié avec eux.
Alfa Hamidou Sissé était toujours misérablement vêtu. Il ne vivait que de poignées de nourriture mendiées. Il prononçait souvent des sentences du genre de celles-ci :

Amadou s'aperçut vite que ces phrases banales n'étaient pas prononcées sans raison, mais qu'elles dissimulaient des prophéties qui ne manquaient jamais de se réaliser. Il se mit alors à révérer Alfa Hamidou, cet homme qui masquait sous des haillons des connaissances qui ne pouvaient lui venir que de Dieu.
Amadou finit par être ému des guenilles dans lesquelles Alfa Hamidou se drapait. Il lui offrit un vêtement neuf.
— Tiens, lui dit-il, prends ceci pour te protéger des intempéries.
Alfa Hamidou éclata de rire :
— J'attends mieux de toi , dit-il.
Amadou, un peu embarrassé reprit :
— Que désires-tu donc que je fasse pour toi ?
— Que tu me bénisses.
— Prends toujours ce vêtement. Par ailleurs c'est à toi à me bénir, en tant qu'ascète et en tant que plus âgé.
— Et si je te bénissais, accepterais-tu de t'allier avec moi pour m'assurer une postérité ?
— Oui.
— Mais comment feras-tu puisque je n'ai qu'une fille et n'espère pas avoir de garçon ? 13
— Je donnerai tes nom et prénom au prochain fils qui naîtra de moi.
Quelques temps après, Adya, la femme d'Amadou qui avait déjà mis au monde un fils premier né nommé Amadou, eut un second fils, que son père baptisa Hamidou Sissé. Amadou Hammadi avait 32 ans lorsqu'il fit la connaissance d'Alfa Hamidou Sissé et d'Ousmane Bokari 14.
Kabara Farma, ayant décelé l'âme d'Amadou, lui prêta un livre sur la vie du grand mystique cheik Abd el Qader el Djilani 15. Amadou prit un vif intérêt aux leçons spirituelles qu'il sut trouver dans cet ouvrage et voulut lui aussi consacrer sa vie au redressement des moeurs. Naturellement détaché des vanités de ce monde, il se sentait comme transporté dans un univers meilleur, mais son âme ardente et pratique n'était pas faite pour la vie érémitique. Alliant ses exercices religieux à son métier de pasteur, vivant du seul produit de son élevage, il va désormais parcourir la boucle du Niger pour y rechercher le contact de tous les marabouts et de tous les hommes influents. Il leur fera partager l'idée que la prière est le moyen le plus efficace de soutenir les âmes chancelantes. C'est au cours d'un de ces voyages qu'il revint à Yongosiré où il avait laissé un ami d'enfance, Dianguina Sarampo, dit Alhadji, fils du chef de village. Alhadji se rallia immédiatement aux idées de son ami dont il admirait sans réserve l'éducation spirituelle et morale. Il se déclara prêt à puiser à son école la force morale qui permet à l'Arne de s'élever au-dessus des bassesses du monde, que les deux amis détestaient depuis leur plus tendre enfance. Amadou confia à Alhadji la contrariété qu'il ressentait à voir les marabouts disputer de questions futiles et fermer les yeux sur des pratiques qui conduisent au péché mortel. Alhadji Dianguina parla de son ami à ses parents. Ceux-ci se montrèrent très heureux de voir leur enfant se lier à un homme dont le père avait vécu en sage et était mort en odeur de sainteté à Yongosiré même 16. Amadou pouvait compter sur les habitants de Yongosiré et sur tous ceux qui relevaient de l'obédience de la famille maraboutique Sarampo. Le village devint pour lui une retraite sûre où il pouvait venir chaque année tenir des conférences secrètes avec ses amis, ses élèves et ses partisans.
Rentré à Roundé Sirou, Amadou décida d'extérioriser son indignation et de marquer sa volonté de lutter contre les entorses données à la Tradition par les marabouts de Dienné. Un vendredi, il quitta le troisième rang où il avait l'habitude de se tenir et passa au second. Le vendredi suivant, il passa du second rang au premier et prit la place d'un de ceux qui surveillent la récitation des prières par l'imam et lui soufflent en cas de défaillance de mémoire. Après la prière, le conseil des notables se réunit pour discuter les mesures à prendre contre Amadou Hammadi dont les libertés, de l'avis de tous, dépassaient les limites permises. En pareil cas, le coupable doit être cité devant une commission d'ulémas pour justifier sa science et sa préséance. Mais ce procédé aurait donné à Amadou Hammadi l'occasion de se faire valoir et attiré sur lui l'attention de tous ; aussi fut-il écarté comme étant de nature à introduire des dissensions dans la ville. Il fut seulement décidé d'interdire à Amadou Hammadi Boubou l'accès de la mosquée, sous peine d'être battu. Une délégation de notables convoqua l'intéressé pour lui notifier la décision. Amadou ne fut pas autorisé à se justifier, il n'avait qu'à écouter la sentence qui le frappait et à obtempérer.
— Tu as des prétentions que Dienné ne peut souffrir. Du troisième rang où tu te tenais à la mosquée, tu es passé au second puis au premier et tu as osé occuper la deuxième place. La prochaine fois, sans doute, tu occuperas la première, celle de l'imam et il ne te restera plus qu'à te déclarer chef de la Dina 17. A partir de ce jour, si tu pénètres dans la mosquée, tu seras considéré comme un provocateur, un agitateur, et tu seras puni en conséquence.
Amadou regagna Roundé Sirou et rapporta à ses élèves la décision des notables de Dienné. Puis il traça un rectangle sur le sol et l'entoura de murettes ; ses élèves venaient y prier avec lui. Au moment des grandes chaleurs, ils mettaient des nattes au-dessus des murettes. Les habitants de Dienné firent signifier à Amadou qu'il devait détruire cet embryon de mosquée. Amadou allait s'y résigner quand le plus décidé de ses élèves, Ali Guidado, s'y opposa.
— Laissons, dit-il, à nos adversaires le soin de venir détruire eux-mêmes notre mosquée, et prouver par ce geste qu'ils sont contre Dieu. Alors nous serons en droit de les considérer comme mécréants, nous pourrons les combattre et s'il le faut verser notre sang pour la défense de notre foi.
Les marabouts de Dienné, métis de Songhay et d'Arabes, non contents d'avoir interdit l'accès de leur mosquée à Amadou, mirent tout en oeuvre pour le perdre et s'employèrent notamment à dresser contre lui le chef temporel du pays, l'Arɗo Amadou. Par contre, les marabouts marka du Pondori étaient prêts à se déclarer pour Amadou, car ils préféraient son ascétisme à la bigoterie de ses antagonistes. La colonie musulmane marka se groupait autour d'une forte personnalité, Ismaïla Diakité, imam de Gomitogo 18. L'influence de ce dernier était considérable : tout le pays reconnaissait sa compétence de jurisconsulte ; il avait en outre le don de lire dans les astres et surtout d'interpréter les songes. C'était un métis de Peul devenu Marka et il devait peut-être à ses ascendances une certaine sympathie pour les Peuls qui, en retour, lui témoignaient un respect religieux. Ismaïla ne venait jamais prier derrière l'imam de Dienné et il ne cessait de mettre les habitants de la ville en garde contre les erreurs de leurs marabouts citant le verset :

« Rappelez-vous quand votre Seigneur proclama : « Certes si vous êtes reconnaissants, Je vous ajouterai d'autres dons, mais certes, si vous êtes ingrats, en vérité, Mon Tourment sera sévère (XIV, 7) ».

De tous côtés, les gens accouraient chez Ismaïlia Diakité, qui pour s'instruire, qui pour se faire interpréter un songe, qui pour demander un conseil. Ismaïla acceptait les offrandes et les employait à nourrir les étudiants et les étrangers dont sa maison était constamment remplie.
Ousmane Bokari 19, épuisé par les exercices spirituels, s'était assoupi sur sa natte. En songe il vit un hâtif 20 qui lui cria :
— La lumière divine a brillé, un empire théocratique sera fondé dans la boucle du Niger.
Ousmane se réveilla en sursaut, plongea ses doigts dans sa barbe et tout en la caressant se mit à réfléchir.
— Qui, se dit-il, va recevoir de Dieu la mission de fonder l'empire ? Comment ce fondateur réussira-t-il à affranchir la boucle du Niger du joug de Ségou ? Allah est grand, il a fait des hommes ses serviteurs sur la terre et il a élevé les uns au-dessus des autres ; il saura bien, Lui, comment faire triompher sa propre cause. L'essentiel pour moi c'est de chercher et de trouver le prédestiné. L'imam Diakité ! Qui plus que cet ascète doublé d'un savant pourrait être l'élu de Dieu pour accomplir l'oeuvre pie ? Il est trempé par la piété et endurci par la mortification. Il saura lutter contre l'idolâtrie, si bien fichée en terre soudanaise qu'elle soit. J'en ai la certitude, quand l'imam Ismaïla lèvera l'étendard de la guerre sainte, le secours d'Allah arrivera et, conformément à la parole du Coran, ce sera « quand tu verras les Hommes entrer dans la Religion d'Allah par flots (CX, 2). »
Après ce monologue intérieur, Ousmane quitta son domicile de Nguémou et se rendit à Gomitogo, auprès de celui qu'il jugeait le plus digne d'être l'homme élevé par Dieu à l'honneur de combattre l'idolâtrie.
— Je viens, dit Ousmane, vers toi, ô imam clairvoyant, me faire interpréter un songe que j'ai fait cette nuit et qui m'a fort impressionné. J'ai vu les fétiches de Ségou périr, j'ai vu l'armée bambara défaite par une poignée de cavaliers peuls et j'ai pensé que seul tu pouvais être le chef de cette petite troupe.
L'imam Ismaïla Diakité tourna le visage vers le ciel :
— Béni, dit-il, soit le visionnaire prophétique qui a vu l'armée de Dieu marcher contre les fétiches de Ségou. Mais, hélas, ce sont des cavaliers peuls qu'il a vu disperser les guerriers idolâtres dont le nombre et la richesse ne serviront de rien. Je ne serai pas le promoteur de l'action, mais un appui.
L'imam Ismaïla, qui avait prononcé ces paroles sans s'adresser directement à son visiteur Ousmane, se tourna vers lui et continua :
— Ce n'est pas moi qui serai le fondateur de l'empire théocratique dont Dieu t'a révélé la création. C'est un humble marabout peul. Il a fait le même rêve que toi. Il me croit le prédestiné et il vient vers moi en ce moment. Va vite à sa rencontre, offre-lui tes services et dispense-le de ma part de pousser jusqu'ici. Tu le croiseras sur la route de Dienné, avant l'entrée de cette ville ; tu le reconnaîtras à ses habits de berger peul et à sa position « en héron » 21.
Ousmane prit la route de Dienné. Non loin de la ville, au lieu dit Togguéré Seyti 22, sur le Kangoulé, il aperçut Amadou qui se reposait sur une jambe. Les deux voyageurs se saluèrent.
Amadou Hammadi Boubou Bari, dit Ousmane, ne pousse pas plus loin. L'imam Ismaïla Diakité, vers qui tu vas, connaît ton rêve et tes intentions. Il te fait dire par moi qu'il ne sera pas le fondateur de l'empire dont nous avons eu tous deux la révélation en songe cette nuit. Tu serais, d'après lui, l'homme prédestiné. Il sera ton appui. Quant à moi, je me déclare le premier auxiliaire de Dieu placé sous tes ordres. Voici ma main : accepte mon serment, je le prête à Dieu.
— Que la volonté de celui qui nous a créés soit faite, répondit Amadou. J'accepte au nom de Dieu ton serment.
— Quelles sont tes instructions, ô maître ? reprit Ousmane.
— Regagne Nguémou, prépare les notables à notre idée et attends mes instructions.
Ousmane rejoignit son domicile.
Amadou de son côté regagna sa résidence à Roundé Sirou, dit Bambanna, et entra en retraite spirituelle. Durant quatre mois il ne communiqua avec personne. Il ne sortit de sa retraite qu'après avoir obtenu en vision certaine l'assurance d'être l'homme élu de Dieu pour dissiper les ténèbres de l'idolâtrie. Il décida alors de se rendre à Toummoura, chez son grand-père maternel, Alfa Gouro. Ce dernier était un marabout doué de quelques vertus thaumaturgiques. Quand Amadou raconta à son grand-père sa vision, confirmée par celle qu'Ousmane avait faite la même nuit à Nguémou, Alfa Gouro dit à son petit-fils :
— Fais-toi accompagner par ton cousin Hamma Oumarou. Allez à Nguémou et priez Ousmane de venir me parler lui-même de sa vision et de l'interprétation donnée par l'imam Ismaïla de Gomitogo.

Pendant ce temps Ousmane n'était pas resté inactif. Il avait d'abord invité les notables des six groupements formant la population peule de la région et leur avait dit :
— Je vous demande de déléguer un représentant par groupement pour discuter une affaire très importante intéressant le pays d'une façon générale et les Peuls d'une façon particulière.
Après consultation, les six notables ci-dessous furent désignés :

A huit-clos, Ousmane mit ces six notables au courant de son rêve, des démarches faites auprès de l'imam Ismaïla et de sa rencontre avec Amadou Hammadi Boubou. Après des entrevues privées et des échanges de vues auxquelles Ousmane ne prit pas part, les six notables décidèrent de prêter serment de fidélité à Amadou Hammadi Boubou au nom de leurs groupements respectifs. Ils chargèrent Ousmane d'aller lui annoncer leur détermination, Ousmane fit ses préparatifs. Il partit de Nguémou pour Roundé Sirou où il espérait trouver son maître. En route il apprit le départ de ce dernier pour Toummoura, c'est donc vers ce village qu'il se dirigea.
Ainsi Ousmane allant à Toummoura et Amadou accompagné de son cousin Hamma Oumarou allant à Nguémou, se dirigeaient sans s'en douter l'un vers l'autre. Ils se croisèrent à Toummay 23 et n'eurent plus qu'à prendre tous la direction de Toummoura. Une fois arrivés à ce village, Ousmane raconta à Alfa Gouro sa vision et tout ce que l'imam Ismaïla avait dit en interprétant le double songe. Alfa Gouro dit :
— Ousmane, donne-moi ta parole que tu n'abandonneras pas mon petit-fils dans l'adversité et que tu ne le trahiras pas quand la prospérité, que j'entrevois, fleurira pour toi et les tiens. Alors seulement, je vous bénirai l'un et l'autre.
— J'ai prêté serment à Dieu entre les mains de mon maître Amadou, répondit Ousmane.
Alfa Gouro s'adressa à son petit-fils :
— Prête serment que tu n'agiras jamais injustement envers Ousmane ni aucun des siens.
Amadou prêta le serment demandé par son grand-père et Alfa Gouro donna sa bénédiction aux deux premiers alliés de l'empire peul du Macina 24. Ousmane fit part à Amadou de la détermination des notables de son pays. Il reçut la bénédiction chaleureuse de son maître et prit congé de lui.
En rentrant à Nguémou, Ousmane trouva les esprits indisposés contre lui. D'aucuns disaient :
— Ousmane est allé seul trouver Amadou Hammadi Boubou. Il lui dira ce qu'il voudra et reviendra nanti de pouvoirs absolus sur nous et nos biens. Cette seule ambition doit justifier son empressement et son activité.
Ousmane devina leur pensée. Loin de s'en vexer, il invita les six notables cités plus haut et leur dit :
— Je suis au courant de vos appréhensions. Ne craignez pas de ma part une usurpation de chefferie. Ce n'est pas à un empire temporel que nous invite Amadou Hammadi Boubou. Nous devons être auprès de lui ce que les Compagnons ont été auprès de notre Prophète et être entre nous ce que les Compagnons étaient entre eux : des frères unis en Dieu et obéissant à un chef qui administre au nom et pour le compte de Dieu. En ce qui me concerne, croyez à ma bonne foi. Je vous dirai ce que Dieu commanda à notre Prophète de dire à ceux qui parmi les siens doutaient de sa sincérité :
« Dis encore : « Combien Allah suffit comme témoin entre vous et moi ! Il est, sur Ses serviteurs, très informé et clairvoyant. Celui qu'Allah dirige est dans la bonne direction. Ceux qu'il égare, tu ne leur trouveras pas de patrons (XVII, 98-99). » Je vous demande de désigner quelqu'un : il ira, avec ou sans moi, chez Amadou entendre de la bouche même de ce dernier les clauses de notre alliance et de celle que j'ai contractée en votre nom.
Un grand conseil fut réuni à la demande des six notables. L'exposé fait par Ousmane fut porté à la connaissance publique et le marabout marka Ismaïla Sankoma, de Soka, fut désigné pour aller voir Amadou. Ousmane et Ismaïla Sankoma se mirent en route pour Toummoura où ils espéraient trouver Amadou. Celui-ci était parti pour Koubay. Ils s'y dirigèrent et purent le joindre sur le Sono 25.
Amadou était occupé à prêcher l'union peule autour d'un drapeau islamique pour lutter contre l'idolâtrie. Il devait parcourir tout le Wouro Modi 26. Il reçut avez beaucoup de joie Ousmane et son compagnon. Il était d'autant plus satisfait de la venue d'Ismaïla Sankoma que celle-ci lui permettait d'espérer le concours des Marka du Pondori. Ismaïla était en effet l'homme le plus écouté des Marka de ce pays.
Amadou profita de la présence d'Ismaïla pour prêcher en donnant toute la mesure de son savoir, de son éloquence et de ses dons de persuasion. Ismaïla en fut fortement impressionné. Amadou confirma les déclarations faites à Ousmane. Ismaïla Sankoma, convaincu de la sincérité d'Ousmane, dit à Amadou :
— Maintenant que personne ne pourra plus se défier d'Ousmane, donne-nous tes instructions et renvoie-nous dans le Pondori où nous allons travailler de notre mieux pour Dieu.
Amadou reçut le serment d'Ismaïla Sankoma. Les deux missionnaires s'en retournèrent, Ousmane content d'être justifié et Ismaïla d'avoir vu et entendu l'homme choisi par Dieu pour fonder un empire théocratique dans le Macina.


Notes
1. Cette prophétie fixait donc l'année 1189 de l'hégire pour la naissance du douzième khalife et l'année 1233 pour son avènement.
2. Kaw-Kaw, qui parait être le nom ancien de Gao, s'écrit en Arabe avec un (20) et un wâw (6). Le nombre 26 est par ailleurs la valeur numérale du grand nom de Dieu révèle à Moïse pour être porté à la connaissance du peuple juif, Yahwahu, qui s'écrit en Arabe avec yây (10), ha (5), wâw (6) et (5).
3. Ayqacha s'écrit en Arabe avec alif (1), yây (10), qâf (100) et chia (1000), sa valeur numéraire est donc 1111. Quant au génie en question, il est nommé dans les poèmes peuls Ali Soutoura, de suturare signifiant protection qui s'écrit en arabe avec sin (300, ta (400), (200), alif (1), (200) et hây (10).
4. Le Wouro Nguiya est la région située au sud-ouest du lac Débo. Les localités de Doga et Banguita en font partie. Pour tous les noms de lieux cités au cours du présent travail, on se référera à la carte au 1/200.000 du Service géographique de l'A.O.F.
5. Le Fittouga est la région de Saraféré, à l'est de Niafounké.
6. Malangal, village situé à 20 kilomètres au nord-ouest de Tenenkou.
7. Yongosiré est situé à 25 kilomètres ouest-sud-ouest de Mopti. Larde baali (campement des moutons) est situé entre Lardé Bali et Mopti.
8. Tyoubbi est le nom de la région située sur la rive droite du Diaka à l'est de Ténenkou. Naréwal, Takanené, et Tiddéré Koli (Tildel Kali de la carte) sont trois villages riverains du Diaka et faisant partie du Tyoubbi. Sossobé (Sossobé Togoro de la carte) est situé à environ 18 kilomètres au nord-est des villages précédents.
9. Sono, qui n'est plus habité actuellement, se trouvait dans le Sébéra, entre Saare Malé et Toumay. La tradition n'a pas conservé le vrai nom de marabout qui enseigna Amadou et qui n'est connu que par l'appellation d'Almami Sono. Un autre Almami Sono, cité dans les poèmes peuls, sera un auxiliaire d'Amadou, devenu Cheikou Amadou.
10. Roundé Sirou est situé au nord-ouest de Dienné, en bordure du marigot de Gomitogo. On y montre encore les murs de la mosquée où venait prier Amadou et qui est toujours utilisée par les habitants du village ; on montre également le tamarinier, au bord du marigot, sous lequel Amadou aimait enseigner.
11. Ce homme, qui deviendra un membre influent du grand conseil de Hamdallay, est citée dans les poèmes peuls.
12. Ousmane Bokar est le futur Amirou Mangal ; Alfa Hamidou Sissé était un marabout de race marka qui vivait presque en ermite et ne fréquentait que Kabara Farma.
13. La descendance par les filles n'est pas considérée comme le prolongement de la lignée.
14. Une tradition prétend que c'est en l'honneur d'Alfa Hamidou Sissé que Amadou avait pris le yettoore Sissé à la place de Sangaré Bari, qui était celui de son clan.
15. Sid Abd el Qader el Djilani est né près de Bagdad en l'an 471 (1078-79). Il fonda la congrégation qui porte son nom. La sainteté de cet homme était telle qu'un de ses adeptes et pu dire : « Si Mohammed n'avait été choisi par Dieu pour être le Sceau des Prophètes, cheik Abd el Qader attrait pu l'être. Cet homme par ses vertus et sa gronde charité est sur les traces de Seydina Ihça (Notre Seigneur Jésus-Christ). »
16. Alhadji Dianguina devait à sa mort être enterré auprès de Hammadi Boubou, le père d'Amadou. Les deux tombes, entourées d'une enceinte de terre sont toujours visibles à Yongosiré. Elles sont pieusement visitées par des fidèles qui y viennent de tous côtés en pèlerinage.
17. Dina est pris dans le sens de société théocratique
18. Le Pondori est la région située au sud et à l'ouest de Djenné ; Gomitogo en est le village principal. Par ailleurs, les Peuls se rattachent tous à quatre clans : Diallo, Diakité, Sidibé et Sangaré, chacun de ces noms de clan ayant plusieurs équivalents.
19. Ousmane Bokari Hammadoun Sangaré, alors âgé de 58 ans, était né et résidait à Nguémou ou Massabougou dans le Pondori. Ce lieu, qui n'est plus habité, se trouve au nord de Soka (Son de la carte, 15 kilomètres ouest de Dienné) ; c'est aujourd'hui un terrain de culture. Ousmane devait jouer sous le nom d'Amirou Mangal (voir note 4, p. 22) un rôle important comme chef d'armée et conseiller juridique de Cheikou Amadou. Son nom reviendra souvent par la suite.
20. Hâtif, sorte de héraut mystérieux envoyé de Dieu.
21. Se tenant sur une jambe, la seconde repliée à hauteur du genou, position de repos habituelle aux bergers Peuls.
22. Togguéré Seyti est une éminence en bordure de la partie dite Kangoulé d'un marigot affluent du marigot de Gomitogo à l'ouest de Dienné.
23. Toummay, village à une vingtaine de kilomètres au sud de Toummoura.
24. Alfa Gouro devait mourir peu après, avant la bataille de Noukouma. Il est enterré à Toummoura, dans un bosquet appelé Tummura KaaYe.
25. Le Wouro Modi est la région située sur la rive gauche du Niger, au nord du Sébéra. Koubay, à 26 kilomètres ouest-sud-ouest de Mopti, est une localité du Wouro Modi, située sur un marigot dont la partie comprise entre Kelloy et le Niger porte le nom de Sono.

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