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Layteere Koodal e Lootori
L'éclat de la grande étoile
suivi du Bain rituel
Récits Initiatiques Fulɓe de Amadou Hampâté Bâ

Edité par Lilyan Kesteloot, Amadou Hampâté Bâ, Christiane Seydou, et Alfâ Ibrâhîm Sow
Collection Classiques Africains. Paris. Armand Colin. 1974. 149 p.


       Table des matieres      

Layteere Koodal — Strophes 1336-1353

cuurki uurdi maa nabboya faa dow;
kanki laatotoo ko na waɗɗoo e mum
du'aa maaɗa yaawoya yottaade;
ndesaa mo nganno-ɗaa millude janngo,
janngo jaawɗo ana tolnii hannde, 1340
sappoyaaɗo ana feewti e men wara;
ta hera e miilde woortoytaa ŋoottaa ».

Ɗoo nii tawimmia ndaamaa oo janta;
ɗoon mo ɗalimmia miɗo hakkunde keeɗe
looɗe ŋoppitiiɗe e laalaaɗe, 1345
cankitaaɗe dow laawol faddoo
bone yaa nii e deeral mbasu mbayla.
Laamɗo Baawɗo waannata perte punnuɗe,
Mo funna jam Mo mawnina ɗum fiinda
piindi feerta ukkita ɓure huumna, 1350
rimoya belɗe uurɗe ɗe deninoytaa
nyaamdo haari kala yiyataa doloyii.
Ɗum yo jam e dow jara ɗum woni Jam.
La fumée de l'encens, jusqu'en haut s'élèvera 1 ;
c'est elle qui deviendra la monture
de tes prières, afin que vite elles parviennent au but 2.
Fais ta réserve, en prévision de demain,
le demain hâtif qui suit aujourd'hui,
le demain annoncé qui nous fait face et vient ;
et sans cesse songe à l'inévitable, l'inlassable 3. »

C'est ici que m'a trouvé ce récit 4 ;
c'est ici qu'il me laisse au milieu des tessons,
des amphores fêlées, des calebasses brisées,
répandus sur la route pour arrêter
le misérable dont le gros ventre est pareil au souffet de la forge.
C'est le Roi Tout-Puissant qui fait périr les pousses de mensonges,
Lui qui fait germer la paix, la fait grandir et fleurir,
s'épanouir les fleurs, s'exhaler leurs vertus plénières
pour donner des fruits suaves, parfumés, qui n'écœurent point
afin que quiconque en mange, soit rassasié et plus jamais n'ait faim.
Telle est la paix enveloppant la paix et c'est cela la paix 5 !
Notes
a. Ces deux formes sont composées chacune d'un verbal accompli emphatique actif (tawi et ɗali) suivi d'un mi objet (cas assez rares dans le fulfulde puisque mi, généralement sujet, ne se trouve dans cette position d'objet que pour les verbaux actifs à l'accompli ponctuel, narratif ou emphatique en -i bref et pour les verbaux actifs à l'inaccompli ponctuel en -a bref). L'orthographe correcte serait donc tawi mi et ɗali mi. Toutefois, la consonne initiale de mi objet se redoublant automatiquement, dans ces cas, nous avons préféré coller la forme verbale et l'objet, leur liaison se faisant toujours du point de vue phonétique.
Notes
1. Il ne s'agit pas d'encens, nécessairement, mais de fumigation de plantes dont il est d'usage de « charger » ou « décharger » le fétiche, support de force, outil, véhicule de la force de l'esprit ou du dieu ; en principe chaque dieu possède ce support (par exemple chaque dieu lare) qui sert aussi pour les sacrifices (en général de lait et de beurre), rarement sanglants chez les Fulɓe, tandis que chez les Bambaras chaque dieu a son « maître du couteau » (murutigi [T.S. Bah]). Geno et Kaydara sont les seuls à ne pas posséder de fétiches ; mais le fait de brûler parfums ou plantes entre dans tous les rites.
2. On dit que l'« on ne dépêche rien vers le ciel de mieux approprié que la fumée ».
3. C'est-à-dire « la mort ».
4. En principe, le récit est terminé ici; mais, comme il y a une entrée, il y a aussi une sortie; elle consiste en considérations sur le monde plein de défauts (tessons) où l'initié devra vivre; monde plein d'embûches auxquelles il ne faut point céder.
5. Le récit doit se terminer sur une évocation agréable, l'invocation à l'adresse de Geno devant attirer son ultime bénédiction.
defte/ahb/koodal-lootori/koodal-2223.html